La loi du 7 décembre 2023 : un tournant majeur pour le bien-être animal dans l’UE

Le 7 décembre 2023, la Commission européenne a présenté un ensemble de propositions législatives destiné à renforcer substantiellement le bien-être animal dans l’Union. Ce « paquet » comprend trois volets principaux : la protection des chiens et des chats, l’amélioration des règles de transport des animaux, et une réponse à l’initiative citoyenne anti-fourrure. Ces mesures s’inscrivent dans la stratégie « De la ferme à la table » du Pacte vert européen.

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1. Des normes inédites pour les chiens et les chats

Pour la première fois, la Commission propose des règles uniformes au niveau européen concernant le bien-être et la traçabilité des chiens et des chats détenus à des fins économiques (élevage, animaleries, refuges, etc.).

Les éléments clés de cette proposition sont :

  • Des conditions minimales d’élevage, d’hébergement et de soins applicables à tous les élevages, animaleries et refuges.
  • Un renforcement de la traçabilité : toute vente ou transmission de chien ou de chat devra être liée à une identification et un enregistrement obligatoires dans des bases de données nationales.
  • Une lutte accrue contre le commerce illégal, notamment via des contrôles automatisés des ventes en ligne et des exigences plus strictes à l’importation.
  • Des formations pour les professionnels (éleveurs, vendeurs, refuges) et une information renforcée pour les acheteurs sur la responsabilité liée à la possession d’un animal.
  • Les importations de chiens et de chats devront respecter des normes équivalentes à celles en vigueur dans l’UE, ce qui vise à limiter les trafics et les élevages à l’étranger dans des conditions moins strictes.

2. Vers des conditions de transport plus humaines

Le second volet du paquet concerne le transport d’animaux vivants, une réforme qualifiée par la Commission de plus grande révision en 20 ans des règles européennes de transport.

Les propositions visent notamment :

  • À réduire la durée des trajets et à imposer des périodes de repos obligatoires lors des voyages de longue durée, permettant aux animaux d’être déchargés pour se reposer, s’alimenter et boire.
  • À augmenter l’espace minimum par animal dans les véhicules, avec des standards adaptés selon les espèces.
  • À interdire le transport dans des conditions climatiques extrêmes : par exemple, imposer des restrictions nocturnes quand les températures dépassent 30 °C, ou limiter la durée des trajets lorsque les températures descendent très bas.
  • À renforcer le contrôle des exportations d’animaux vivants vers des pays tiers : les véhicules doivent être équipés d’outils numériques (géolocalisation, bases de données centrales) pour mieux assurer le respect des normes.

Ces mesures répondent à des critiques de longue date : les réglementations actuelles datent de plusieurs décennies et ne reflètent plus les connaissances scientifiques ni les préoccupations des citoyens.

3. Une réponse à l’initiative citoyenne « Fur Free Europe »

Le troisième volet porte sur l’initiative citoyenne européenne (ICE) « Fur Free Europe », qui demande l’interdiction de l’élevage d’animaux à fourrure et la vente de produits en fourrure dans l’UE.

  • La Commission a mandaté l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) pour produire un avis scientifique sur le bien-être des animaux de ferme destinés à la fourrure.
  • Sur la base de cet avis, la Commission annoncera les mesures les plus appropriées, qui pourraient aller jusqu’à des restrictions ou des interdictions, mais sans décision immédiate de bannissement total pour l’instant.
  • Ces réflexions s’inscrivent dans l’approche « Une seule santé » («One Health») — qui considère que la santé animale, humaine et environnementale sont interconnectées.

4. Enjeux, critiques et défis

Un progrès très attendu

Pour les défenseurs du bien-être animal, ce paquet législatif représente une avancée majeure. L’harmonisation des règles pour les chiens et les chats professionnels pourra réduire les abus, améliorer la traçabilité et freiner le marché illégal. De même, des conditions de transport plus strictes sont un soulagement pour beaucoup d’acteurs, à la fois éthiques et scientifiques.

Des critiques et des limites

  • Certains pointent que le paquet ne couvre pas toutes les thématiques initialement envisagées : par exemple, l’initiative citoyenne « End the Cage Age » (mettant fin aux cages en élevage) n’a pas reçu de proposition concrète d’interdiction à cette date.
  • Le volet fourrure reste à l’étude : la Commission ne s’engage pas automatiquement sur une interdiction, mais choisit d’abord d’obtenir un avis scientifique. Certains considèrent que cela ralentit l’action.
  • La mise en œuvre pratique pourrait être complexe : le renforcement des bases de données nationales pour la traçabilité des animaux, ou l’usage des outils numériques pour le transport, nécessitent des ressources, des infrastructures et une coopération efficace entre États membres.

5. Prochaines étapes et perspectives

  • Les propositions législatives seront soumises au Parlement européen et au Conseil pour examen et discussions.
  • L’EFSA doit rendre son avis scientifique sur la fourrure, ce qui orientera les décisions futures de la Commission.
  • La Commission a également annoncé qu’elle continuera à travailler sur d’autres propositions dans le cadre du paquet initial prévu : logement des animaux à la ferme, bien-être à l’abattage et étiquetage, entre autres.
  • Pour les États membres, il s’agira de transposer ces normes, de renforcer les contrôles, et d’investir dans les systèmes de surveillance, de registre et de transport.

Conclusion

Le 7 décembre 2023 marque une date clé dans la législation européenne du bien-être animal : la Commission propose un train de mesures qui combine ambition normative (chiens et chats), réforme pratique (transport) et réactivité citoyenne (initiative fur free). Si ces propositions sont adoptées, elles pourraient redéfinir les standards de protection animale dans l’UE. Reste cependant à voir comment chaque État membre traduira ces ambitions en actions concrètes, et si les futures législations couvriront tous les sujets initiaux, comme la fin des cages en élevage.

2 réflexions sur “La loi du 7 décembre 2023 : un tournant majeur pour le bien-être animal dans l’UE”

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